Le Paradigme Brown-Peterson
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Distraction et oubli :
La dégradation d'informations de la MCT (mémoire à court terme)
Nous sommes souvent placés dans des situations dans lesquelles un soudain et court moment de distraction cause la perte rapide de la mémoire de certaines informations. Le rôle joué par cette distraction dans l'oubli est normalement étudié à l'aide du Paradigme de Brown-Peterson, nommé ainsi en l'honneur de Brown (1958), ainsi que Peterson et Peterson (1959). Dans ce programme, une série de stimuli à l'étude est présentée à un sujet, pendant une durée d'étude spécifiée, après laquelle une tâche de distraction apparaît. À la fin de cette tâche de distraction, il est demandé au sujet de se rappeller d'autant d'articles que possible de l'étude originale. La recherche de Brown (1958) et de Peterson et Peterson (1959) a permis d'établir que la mémoire d'un individu est généralement peu performante, après la présentation d'une tâche de distraction à celui-ci. Cependant, cette mémoire peut être améliorée si un intervalle de répétition est inclus dans le programme.
Afin de tester les effets de la tâche de distraction sur la mémoire, Brown (1958) présente à chaque sujet une série de consonnes, puis une série de chiffres, que le sujet doit lire toutes deux à haute voix. Bien que la mémoire des consonnes chez le sujet soit très mauvaise dans tous les cas, Brown (1958) alors a laissé chaque sujet répéter les consonnes avant de leur montrer la tâche de distraction. Cette adaptation conduit à une amélioration de la performance de la mémoire des sujets à l'étude.
La recherche de Peterson et Peterson (1959) révèle une baisse rapide de performance chez les sujets, performance prise en tant que fonction d'intervalles de mémoire, pendant lesquelles même de petites quantités d'information sont rapidement oubliées. Alors que l'ajout d'un intervalle de répétition permet de soutenir la conclusion de Brown - que cette répétition améliore la performance du sujet - il ne modifie pas le taux d'oubli de la mémoire.
Brown (1958) et Peterson et Peterson (1959) pensent que les conclusions de leurs recherches fournissent l'évidence de l'existence d'une trace de mémoire qui se dégrade rapidement lorsque les articles visionnés ne sont pas répétés mentalement. Ces scientifiques ont aussi établi le postulat suivant : que le recouvrement d'informations provenant de la mémoire à court terme (MCT) se fait plus facilement que le recouvrement d'informations conservées dans la mémoire à long terme (MLT), le niveau de rappel de la mémoire à long terme est donc plus élevé. Ils en ont, par conséquent, conclu que les informations conservées dans la MCT se dégradent plus rapidement que dans la MLT, à moins de fournir des moyens de répétition des articles vus. Enfin, la répétition semble également augmenter les chances de transfert des informations de la MCT à la MLT.
Cette étude, qui utilise une évaluation intra-sujet, est conçue de façon à établir l'exactitude de la mémoire de stimuli à l'étude, après apparition d'une tâche de distraction, la tâche étant précédée d'un intervalle de répétition. L'expert peut choisir de manipuler une ou plusieurs des sept variables indépendantes : type d'essai (visuel ou auditif), type d'étude (lettres ou nombres), type de distracteur (lettres ou nombres), nombre d'articles à l'étude (jusqu'à 21 lettres ou 10 chiffres par essai), la durée de l'étude (en millisecondes), la durée de conservation de la mémoire (en secondes) et le nombre d'essais (supérieur à 0).
Les stimuli à l'étude sont les lettres de l'alphabet et les nombres, formulés en tant qu'articles d'étude.
Le paradigme de Brown-Peterson, dans cette étude, reflète les expériences effectuées plus tôt par Peterson
et Peterson (1959). On présente - visuellement ou auditivement - une série d'articles à un individu donné.
Suit alors une période d'étude - variable - puis un intervalle de distraction dont la durée peut aussi varier.
La tâche de distraction réside en la présentation d'articles en séquence, comptés en ordre décroissant
de trois en trois. Si le distracteur présenté sont les lettres de l'alphabet, l'expérience les
« enveloppe »,
c'est-à-dire que les lettres commencent à A et repartent de Z, si nécessaire. À la fin de la tâche de distraction,
il est présenté au sujet un signal réponse. Après sa disparition, le sujet doit entrer autant d'articles de l'étude
originale dont il se souvient que possible.
Dans leur recherche, Peterson et Peterson (1959) manipulent à la fois l'intervalle de répétition et l'intervalle de conservation de la mémoire, démontrant ainsi que la durée de l'intervalle de conservation de la mémoire n'a aucune incidence sur le taux d'oubli. Murdock (1961) a testé l'effet qu'a sur la mémoire individuelle le rappel d'une somme d'informations présentées et a ainsi démontré que le taux d'oubli est plus bas lorsque le sujet ne doit se souvenir que d'un seul article. Il n'existe cependant aucune différence entre la capacité à se rappeler de trois lettres et la capacité à se rappeler de trois mots.
La similarité de la tâche de distraction et celle des articles à l'étude démontre qu'il existe une conséquence directe à l'efficacité de cet élément distracteur. Celui-ci s'avère être plus efficace à causer l'oubli lorsqu'il est de même nature que les articles présentés dont le sujet doit se rappeler (c'est-à-dire, des lettres ou des nombres), parce qu'il pertube la répétition des articles (Pellegrino et al., 1976).
Brown (1958) et Peterson et Peterson (1959) ont réalisé que leur tâche de distraction a une influence sur la dégradation progressive des traces de mémoire, lorsque les informations sont oubliées dans une durée de 15 à 20 secondes. Des recherches ultérieures ont néanmoins permis d'établir que le processus d'oubli est en fait bien plus rapide (c'est-à-dire qu'il s'effectue dans les toutes premières secondes) que le suggèrent Brown et Peterson (Muter, 1980 ; Sebrechts, Marsh, & Seamon, 1989).
Brown J. (1958). Some tests of the decay theory of immediate memory. Quarterly Journal of Experimental Psychology, 10, 12-21.
Murdock, B. B. (1961). The retention of individual items. Journal of Experimental Psychology, 62, 618-625.
Muter, P. (1980). Very rapid forgetting. Memory-and-Cognition, 8(2), 174-179.
Pellegrino, J. W. (1976). Differential distraction effects in short-term and long-term retention of pictures and words. Journal-of-Experimental-Psychology:-Human-Learning-and-Memory, 2(5), 541-547.
Peterson, L. R., & Peterson, M. J. (1959). Short-term retention of individual verbal items. Journal of Experimental Psychology, 58, 193-198.
Sebrechts, M. M,, Marsh, R. L.& Seamon, J. G. (1989). Secondary memory and very rapid forgetting. Memory-and-Cognition, 17(6), 693-700.